Il y a beaucoup d’idées reçues sur le recrutement en Suisse : les entreprises suisses ont-elles vraiment des difficultés à recruter ? Comment se passe le processus de recrutement en Suisse ? Quels sont les facteurs dont les professionnels RH tiennent vraiment compte pour évaluer les candidats ? Quels sont les profils recherchés ? Quelle est l’importance du marché caché ? Les candidats étrangers sont-ils écartés au profil des locaux ? Recrute-t-on encore des seniors en Suisse ?
Pour répondre à ces questions, et pour se faire une idée juste de l’état du recrutement en Suisse, le cabinet de recrutement Von Rundstedt a sorti une étude qui fait un état des lieux précis du marché de l’emploi en Suisse. Un document particulièrement utile pour les candidats à la recherche d’un emploi en Suisse.
Le recrutement en Suisse
Cette partie analyse le comportement, les attentes et les observations des professionnels RH en Suisse d’un point de vue du recrutement.
Les canaux que les recruteurs considèrent comme importants ou très importants pour la recherche et le recrutement de candidats
- Le site internet de la société (pour 79% des recruteurs)
- Les sites portail d’offres d’emploi (76%)
- Le réseau personnel des employés (réseautage ou networking) (73%)
- Les médias sociaux (réseaux sociaux professionnels comme LinkedIn) (66%)
- L’intranet de la société (57%)
- Les agences de placement, chasseurs de têtes et cabinets de recrutement (30%)
Prise en compte des candidatures spontanées par les recruteurs
- Recruteurs qui prennent en compte les candidatures spontanées : 54%
- Recruteurs qui ne les prennent pas en compte : 46%
Concordance entre le profil du candidat et les pré-requis du poste pour que sa candidature soit prise en compte
Interprétation de ce graphique sur un exemple : pour près de 60% des recruteurs, il faut que 76 à 90% du profil du candidat corresponde aux exigences du poste pour qu’ils puissent être évalué pour un éventuel entretien.
Pourcentage de postes pour lesquels l’entreprise a publié une annonce
Utilisation d’un ATS (Applicant Tracking System) pour le recrutement
- Recruteurs qui utilisent un ATS pour la sélection de candidats : 35%
- Recruteurs qui n’utilisent pas d’ATS pour la sélection : 65%
Outils que les recruteurs en Suisse jugent importants pour l’évaluation d’un candidat
- Les références (demandées explicitement au candidat) : 91%
- Les certificats de travail : 73% (demandés mais pas forcément utilisés)
- L’évaluation de compétences (« assessment ») : 69%
- Les références (qui sont prises sans le consentement du candidat) : 60%
- Les certificats de travail : 55% (demandés et réellement utilisés par les recruteurs)
- Les tests psychométriques ou psychotechniques : 38%
En résumé
- Pratiquement la moitié des recruteurs ne tiennent pas compte des candidatures spontanées. Concrètement, cela signifie que lorsqu’un candidat postule de cette manière, il a une chance sur deux que cela ne serve à rien.
- Les agences de placements et chasseurs de têtes sont les grands laissés pour compte dans le recrutement. A l’inverse, le site internet de l’entreprise et les job boards semblent encore occuper une part importante pour le recrutement de candidats. Le réseau est plus que jamais important, et la part des réseaux sociaux comme Linkedin n’est probablement pas aussi importante qu’on aurait pu le croire (66% « seulement » ).
- Les références occupent une part très importante de l’évaluation des candidats (9 recruteurs sur 10 déclarent cet outil comme important), et dans 60% des cans, ces mêmes recruteurs estiment qu’une prise de référence non consentie (le recruteur se renseigne sur vous sans vous demander votre avis) est importante pour le recrutement.
- Les certificats de travail sont jugés importants par plus de 70% des recruteurs, mais seul un sur deux semble l’utiliser réellement dans l’évaluation d’un candidat.
- Seuls 35% des recruteurs utilisent un ATS, probablement des entreprises de taille relativement importante. Les ATS nécessitent, du point de vue des candidats, une stratégie particulière dans le choix de mots-clés à insérer dans son CV ou dans le système de recrutement.
Le recrutement des profils recherchés en Suisse
Les recruteurs appellent “pénurie de talents” la difficulté qu’ils ont à recruter des profils qualifiés. On parle beaucoup de ce sujet, mais qu’en est-il réellement ? Les réponses des recruteurs ci-dessous donnent un véritable éclairage.
Profils où la pénurie est la plus importante selon les recruteurs
- Informatique : 64% des recruteurs estiment que la pénurie est importante
- Ingénieurs et techniciens : 61%
- Recherche et développement (R&D) : 54%
- Management : 36%
- Vente : 22%
Profils où la pénurie est la moins importante selon les recruteurs
- Administration : 4%
- Marketing : 11%
- Achat : 13%
- Communication : 14%
- Finance et comptabilité : 16%
Au sein de l’entreprise des recruteurs, importance et impact économique de la pénurie de talent
- Impact fort à très fort pour près de 60% des entreprises
- Impact plutôt faible à très faible pour plus de 40% des entreprises
Facilité ou difficulté pour les entreprises suisses de recruter des profils européens
- Pour près de 45% des recruteurs, il est difficile ou très difficile de recruter des profils européens
- Pour plus de 55% d’entre eux, il facile ou plutôt facile de recruter des profils européens
Facilité ou difficulté pour les entreprises suisses de recruter des profils extra-européens
- Pour plus de 85% des recruteurs, il est difficile ou très difficile de recruter des profils extra-européens
- Pour près de 15% d’entre eux, il facile ou plutôt facile de recruter des profils extra-européens
Dans le recrutement, arbitrage entre un profil local et un profil étranger
- 79% des recruteurs choisiront le profil local à profils et qualifications globalement équivalents
- 21% des recruteurs choisiront le profil étranger
Si on regarde dans le détail par région, il semblerait qu’en Suisse romande et au Tessin les recruteurs sont légèrement moins enclins à recruter, dans ce cas, des profils suisses (respectivement 69% et 67%). C’est donc en Suisse alémanique que la préférence nationale semble être la plus importante.
Impact de la nouvelle loi obligeant les entreprises suisses à annoncer les postes vacants sur la pénurie de talents
- 81% des recruteurs pensent que la nouvelle loi n’aura pas d’impact
- 19% des recruteurs estiment qu’elle permettra au contraire d’atténuer la pénurie de talents en Suisse
Investissement dans la marque employeur de l’entreprise
- Dans 76% des cas, l’entreprise développe sa marque employeur pour augmenter son attractivité
- Dans 24% des cas, l’entreprise n’investit pas dans sa marque employeur
En résumé
- La pénurie est, sans surprise, la plus forte dans les métiers techniques : informatique, ingénierie, R&D
- Le fait que plus de 75% des entreprises investissent dans leur marque employeur est probablement un signe très clair de besoin de recrutement.
- Les fonctions de management semblent également touchées, et dans une moindre mesure les fonctions de vente
- Les postes dans l’administration, le marketing, la communication et les achats sont les postes où on a le moins de problèmes de pénurie. Pour les candidats qui recherchent un emploi dans ces fonctions, c’est une information importante à retenir.
- La grande majorité des entreprises subissent négativement la pénurie de talents, alors que dans le même temps une entreprise sur deux prétend avoir des problèmes pour recruter des candidats européens.
- La préférence nationale est une réalité (ce qui n’est pas illogique) : à profil égal, les recruteurs préfèrent majoritairement recruter un profil local
Le recrutement des seniors en Suisse
Les seniors (les candidats âgés de plus de 50 ans sont-ils réellement discriminés sur le marché de l’emploi en Suisse ?
Comment se comportent les professionnels RH face au recrutement de tels profils ? Voici quelques chiffres très intéressants :
Proportion de recruteurs qui observent une discrimination systématique des seniors dans le processus de recrutement
Sur l’ensemble de la Suisse, les recruteurs estiment ce chiffre à 81%, alors qu’ils ne sont que 33% à estimer que cette discrimination existe dans leur propre société
Proportion de recruteurs qui observent une discrimination systématique des seniors dans le cas de licenciements
Sur l’ensemble de la Suisse, les recruteurs estiment ce chiffre à 60%, et à 20% dans leur propre société
Proportion de recruteurs qui observent une discrimination systématique des seniors dans le cas des promotions internes
Sur l’ensemble du territoire suisse, les recruteurs estiment ce chiffre à 42%, et à 21% dans leur propre société
Discrimination positive : préférence accordée aux profils seniors s’ils sont légèrement plus faibles que des profils plus jeunes
- Dans 20% des cas, les recruteurs affirment que la préférence est donnée dans ce cas aux seniors
- A l’inverse, ce n’est pas le cas pour 80% des recruteurs
Discrimination positive : préférence accordée aux profils seniors s’ils sont équivalents à des profils plus jeunes
- Dans 48% des cas, les recruteurs estiment que la préférence est accordée aux profils seniors
- Ce n’est pas le cas pour 52% des recruteurs
Les seniors face aux étrangers : seniors de nationalité suisse en compétition avec des profils équivalents étrangers et plus jeunes
- 73% des recruteurs vont accorder une préférence aux seniors
- 27% des recruteurs n’accorderont pas de préférence aux seniors
Les idées reçues des recruteurs sur les candidats ayant un profil senior
- 54% des recruteurs estiment que les seniors sont moins agiles avec les nouvelles technologies
- 45% des recruteurs pensent que les seniors sont plus réticents au changement
- 32% des recruteurs estiment que les seniors sont trop chers
- 32% pensent qu’ils sont moins agiles et flexibles
- 26% estiment qu’ils sont moins faciles à manager
- 16% pensent qu’ils sont moins énergiques et dynamiques
- 8% pensent qu’ils sont plus difficiles à intégrer dans une équipe existante
En résumé
- Les recruteurs ont tendance à penser que sur le marché de l’emploi suisse existe une très forte discrimination qui désavantage les profils seniors (plus de 80% le pensent), alors que visiblement un tiers des recruteurs affirment que cette discrimination existe dans leur propre entreprise. En clair, si cette discrimination est évidente et forte, elle n’est pas aussi développée que ce que les recruteurs imaginent.
- Il semble exister une forme de discrimination positive des seniors à la fois dans le cas où leur profil est légèrement moins bon que le profil plus jeune, mais également dans le cas où leur profil est équivalent à un profil plus jeune (avec dans ce cas un recruteur sur deux qui accorde sa préférence au profil senior)
- Face aux profils étrangers et plus jeunes, les profils seniors semblent avoir un net avantage puisque 73% des recruteurs affirment donner une préférence au profil senior : l’idée reçue selon laquelle les seniors locaux seraient remplacés par des profils étrangers et plus jeunes est donc totalement infondée.
- Parmi les idées reçues des recruteurs sur les seniors, le manque d’agilité avec les nouvelles technologies et la réticence au changement sont les deux facteurs les plus mis en avant. Le coût d’un senior n’arrive qu’en 3ème position (un tiers des cas).
Nous avons là le point de vue des professionnels : à vous maintenant de nous donner le vôtre !
source : Von Rundstedt