Depuis la monté du franc suisse par rapport à l’euro et au dollar commencée il y a quelques mois, certaines entreprises suisses, la plupart du temps des entreprises industrielles très dépendantes de l’exportation de produits, ont décidé de rémunérer leurs salariés en euro (ou en autres devises), ou encore d’indexer les variations des salaires aux variations des cours de change EUR/CHF.
Les syndicats suisses, qui jugent ces pratiques abusives, ont tenté de faire des recours, et des conseillers nationaux (parlementaires) ont même proposé des motions pour interdire ces pratiques. Toutes ces interdictions ont été rejetées par le Conseil fédéral, qui rappelle toutefois des règles très importantes à l’occasion d’un communiqué de presse, et dont nous vous proposons une synthèse dans la suite.
- Le Conseil fédéral ne souhaite pas interdire le versement des salaires dans une monnaie étrangère par une entreprise suisse. En clair, il est tout à fait possible de signer un contrat de travail avec une entreprise suisse (pour un emploi en Suisse ou hors de Suisse), tout en étant payé dans une monnaie autre que le franc suisse (euro ou dollar par exemple).
- Si l’entreprise est soumise à une convention collective de travail (CCT), et qu’elle rémunère ses salariés dans une devise autre que le franc suisse, elle a toujours obligation de respecter les salaires minimum en vigueur.
- Une entreprise qui proposerait de rémunérer une partie seulement de ses salariés en devises étrangères (il a en effet été question dans plusieurs cas de rémunérer uniquement les travailleurs frontaliers en euros) serait en infraction avec l’accord sur la libre circulation des personnes. En clair, si une entreprise décide de rémunérer ses salariés qui travaillent en Suisse en euro par exemple, elle devra le faire pour tous ses employés, sans distinction de nationalité ou de permis de travail.
Depuis quelques mois, le franc suisse reprend son rôle de devise “refuge” et s’apprécie de manière significative par rapport aux autres monnaies, notamment le dollar et l’euro. Ce franc fort pose un problème sérieux aux entreprises suisses, et risque, à terme, de déstabiliser l’économie nationale qui est fortement exportatrice (1 franc sur 2 du PIB suisse provient de l’exportation). La BNS (Banque Nationale Suisse) a, entre autres mesures très fortes, fixé un cours plancher de 1,20 francs suisses (pour 1 euro).
Voir le communiqué de presse officiel pour plus d’informations.
Bonjour,
l’idée de croire qu’avec les variations du taux de change les frontaliers gagnent plus est un leurre. En effet, si avec ces variations, notre salaire peut augmenter, il faut tenir compte du fait que le taux de déclaration pour les impôts des frontaliers varie aussi et grassement !! De plus on peux observer que les prix dans les zones frontalières varie aussi selon le taux de change. Pour avoir fait personnellement le calcul : je souhaite que le taux de change pour les salaires soit fixe. Les seuls gagnant dans les zones frontalières, ce sont les commerces et l’état français !
Cette analyse est à mon avis incomplète: Voici une analyse juridique fouillée, effectuée pour l’Union Syndicale Suisse, publiée sur mon blog: http://www.schwaab.ch/archives/2011/08/08/salaires-payes-en-euros-ou-lies-au-cours-de-l%E2%80%99euro-c%E2%80%99est-illegal/
Même si l’employeur a une grande liberté en matière de fixation des salaires, le versement du salaire en euros ou l’adaptation à un cours de l’euro défavorable revient à reporter le risque d’entreprise sur les salarié-e-s, ce qui est prohibé par le droit du travail. En outre, de telles pratiques ne sauraient être assimilées à une participation à un résultat négatif de l’entreprise, pratiques admises par la doctrine. Enfin, traiter différemment travailleurs suisses, ressortissants ou résidents de l’UE est prohibé par l’accord sur la libre circulation des personnes (ALCP).
L’employeur a une marge de manœuvre pour fixer les salaires et pour les modifier à la baisse (à condition de respecter les règles du congé-modification), du moment qu’il respecte la bonne foi, les bonnes mœurs et que le montant du salaire reste objectivement et suffisamment prévisible. Il ne peut cependant pas les baisser de manière unilatérale. La règle obligeant l’employeur à verser le salaire dans une monnaie ayant cours légal (art. 323b CO) n’est pas d’une grande aide pour s’opposer au versement du salaire en euros, étant donné qu’elle n’est pas impérative et peut être modifiée soit par convention entre les parties au contrat individuel de travail, soit par un usage local (même si ce denier ne doit être admis que de manière restrictive et n’existe certainement pas dans les branches actuellement concernées par cette problématique). Il en va de même des règles combattant la sous-enchère salariale qui ne prévoient de mécanismes d’intervention des autorités qu’en cas de «sous-enchère salariale abusive et répétée», possibilités d’intervention ne permettant en outre que de fixer des salaires minimums dans des contrats-type de travail (art. 360a CO), de faire respecter ou d’étendre des salaires minimums de conventions collectives de travail (CCT). Or, tant que le salaire versé en euros ou indexé au cours de la monnaie n’est pas, au cours du jour en francs, inférieur aux salaires minimums obligatoires, ces règles sont respectées.
En revanche, verser le salaire en euros ou adapter systématiquement à la baisse les salaires au cours de la monnaie revient à reporter le risque économique sur les travailleurs, ce qui est proscrit de manière impérative par l’article 324 CO. En effet, les variations de cours font partie du risque économique que doit prévoir et assumer l’employeur. Il est d’ailleurs le seul à en bénéficier si les variations de cours influencent favorablement le résultat de l’entreprise.
Le versement des salaires en euros ou l’adaptation au cours de l’euro est également une participation du travailleur à un résultat négatif de l’entreprise (art. 322a CO) qui n’est pas licite aux yeux de la doctrine, car elle n’a aucun effet stimulant, les travailleurs n’ayant aucune influence sur les cours de la monnaie. Pour ces raisons, verser des salaires en euros ou les adapter systématiquement aux variations du cours de la monnaie n’est pas admissible. De telles clauses, qu’elles aient été introduites par commun accord, par congé-modification ou par accord collectif sont donc nulles. Elles ne peuvent pas être introduites non plus sur la base des dispositions «de crise» d’une CCT, car celle-ci doit respecter le droit impératif (art. 358 CO). L’employeur qui effectuerait régulièrement des modifications ponctuelles des salaires en fonction des variations du cours de la monnaie commettrait un abus de droit (art. 2 CC).
Enfin l’interdiction de discrimination de l’article 2 ALCP (précisée dans l’art. 9 al. 1 Annexe I ALCP) interdit également un traitement différencié en fonction de la nationalité ou du lieu de résidence. Des motifs économiques comme les variations du cours de change ne peuvent être invoqués pour justifier de telles discriminations. Ainsi, l’employeur ne peut pas appliquer des salaires liés aux variations du cours de la monnaie à ses seuls salarié-e-s originaires de l’UE ou aux frontaliers-ères.
Bonjour Monsieur,
Un grand merci pour cette précision plus que… précise ! Faut-il conclure que le communiqué de presse de la Confédération est inexact, ou plutôt qu’il se base sur des informations inexactes ?
Les frontaliers doivent commencer à arrêter de jouer les fines bouches. Vous avez par définition TOUS les avantages par rapport à vos compatriotes et aux Suisses!
– vous avez du BOULOT
– vous êtes MIEUX payés
– vous n’avez même pas besoin d’avoir fait des ETUDES (conducteur TPG à Genève sans étude gagne un salaire de cadre en France)
– votre coûts de la vie est BAS
Avec la baisse de l’euro vous vous gavez et vous avez encore l’arrogance de vous plaindre si l’on décide de vous payer en franc suisse???! UN PEU DE SOLIDARITE AVEC LA MAIN QUI VOUS NOURRIT!
Vous ne l’avez peut-être pas remarqué mais à Genève (et ailleurs) mais on aime pas trop les frontaliers à la base et si en plus vous faites les pingres, vous allez attirer des ennuis par rapport à la population locale! Acceptez une baisse de salaire en euro pour que les entreprises suisse ne vire personne!!!! Regardez plus loin que votre petit porte-monnaie beauf!
Cher Benjamin,
Difficile de croire un mot d’une personne qui est capable de dire une chose et son contraire le même jour sur 2 sites différents (voir ce commentaire du blog de Travailler en Suisse où vous dites précisément que les frontaliers acceptent des bas salaires…).
Par ailleurs, lorsque vous dites que le coût de la vie est bas en France en zone frontalière, je ne suis pas certain que nous parlions de la même zone frontalière, car pour moi, le coût de la vie élevé n’est s’est pas arrêté à la douane.
Enfin, les genevois apprécieront de vous entendre dire qu’à Genève et ailleurs on n’aime pas les frontaliers… C’est indiscutablement votre avis, mais ne mettez pas tout le monde dans le même panier. Enfin, compte tenu du niveau particulièrement bas de ces propos provocateurs qui n’apportent pas grand chose à la communauté ou au débat, je censurerai vos prochaines contributions si elles ne respectent pas une certaine ligne de conduite.